Tech & Innovation Radar — Issue #81
Une fenêtre ouverte sur l’actualité des nouvelles technologies et de la recherche.
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bonne journée !
Cette semaine
- Attention Big Bang !!! Sommes nous à l’aube d’une remise en question du modèle standard de la physique ? tellement excitant que je commence par ça !
- L’intelligence des IA : il nous reste de la marge … nous voilà rassurés
- Oups la boulette : Google révèle et bloque les activités d’un groupe de hackeurs … qui s’avère être une équipe du contreterrorisme d’un allié des USA
- Le feuilleton SolarWinds : le Department of Homeland Security fait aussi parti des heureux élus, y.c. l’ancien chef du département américain de la sécurité intérieure
- Quantum : je ne pouvais pas ne pas parler de ce nouveau record auquel ont participé des chercheurs de la chaire de photonique de CentraleSupelec ! un laser générant 250 trillions de nombres aléatoires par sec., pour sécuriser les informations numériques. Bravo à eux ! et fier d’avoir été parmi les premiers étudiants :)
- Nouvelles photos intimes de M87* … mais si, le trou-noir … accompagné cette fois de ses lignes de champs … sublime !
Braking News !
Est-on en train de mettre à jour une nouvelle physique au CERN ? Pourquoi nous sommes prudemment optimistes — theconversation.com
Lorsque l’accélérateur géant du CERN, le Grand Collisionneur de Hadrons ou LHC, a démarré il y a dix ans, les espoirs étaient grands de découvrir bientôt de nouvelles particules qui pourraient nous aider à percer les plus grands mystères de la physique. Matière noire, trous noirs microscopiques et dimensions cachées n’étaient que quelques-unes des possibilités. Mais à part la découverte spectaculaire du boson de Higgs, le projet n’a pas réussi à fournir des indices sur ce qui pourrait se trouver au-delà du modèle standard de la physique des particules, qui reste aujourd’hui notre meilleure théorie du microcosme, malgré ses défaillances.
C’est pourquoi le nouvel article de la grande collaboration autour du LHCb, l’une des quatre expériences géantes du LHC, devrait faire battre le cœur des physiciens un peu plus vite. Après avoir analysé des trillions de collisions produites au cours de la dernière décennie, nous pourrions être en train de voir la preuve de quelque chose de tout à fait nouveau — potentiellement la particule vectrice d’une toute nouvelle force de la nature.
Mais l’excitation est tempérée par une extrême prudence. Le modèle standard a résisté à tous les tests expérimentaux qu’on lui a fait subir depuis qu’il a été élaboré dans les années 1970. Il faut donc des preuves extraordinaires pour affirmer que nous voyons enfin quelque chose qu’il ne peut expliquer.
Anomalie étrange
Le modèle standard décrit la nature à la plus petite des échelles, comprenant des particules élémentaires connues sous le nom de leptons (comme les électrons) et de quarks (qui peuvent s’assembler pour former des particules plus lourdes comme les protons et les neutrons), ainsi que les forces grâce auxquelles ces particules interagissent.
Il existe de nombreux types de quarks, dont certains sont instables et peuvent se désintégrer en d’autres particules. En 2014, les physiciens du LHCb ont repéré des quarks « bottom » se désintégrant de manière inattendue. Notre nouveau résultat est lié à ce qui était alors une anomalie expérimentale.
Plus précisément, les quarks bottom semblaient se désintégrer en « muons » (un type de lepton) moins souvent qu’ils ne se désintégraient en électrons. C’est étrange, car le muon est en fait une copie carbone de l’électron, identique en tous points sauf qu’il est environ 200 fois plus lourd.
On s’attendrait à ce que les quarks bottom se désintègrent en muons aussi souvent qu’en électrons. La seule façon dont ces désintégrations pourraient se produire à des taux différents serait que des particules jamais vues auparavant soient impliquées dans la désintégration et fassent pencher la balance en défaveur des muons.
Artificial Intelligence
Y a-t-il de l’intelligence dans l’intelligence artificielle ? — theconversation.com
Elon Musk, Stephen Hawking et Bill Gates s’inquiétèrent d’une fin prochaine de l’humanité, supplantée par des intelligences artificielles échappant à tout contrôle.
N’était-ce pas un peu exagéré ? C’est précisément ce que pense l’IA. Dans un article qu’il a écrit en 2020 dans The Guardian, GPT-3, ce gigantesque réseau de neurones doté de 175 milliards de paramètres explique :
Je suis ici pour vous convaincre de ne pas vous inquiéter. L’intelligence artificielle ne va pas détruire les humains. Croyez-moi.
Y a-t-il des compétences mentales humaines qui restent strictement hors d’atteinte de l’intelligence artificielle ?
La modélisation en sciences cognitives a révélé l’existence de plusieurs mécanismes, autres que l’association par continuité, qui sont autant de composantes de l’intelligence humaine. Parce que leur expertise est entièrement précalculée, ils ne peuvent pas raisonner dans le temps pour décider qu’un animal mort reste mort, ou pour comprendre le sens de la phrase « il n’est toujours pas mort » et la bizarrerie de cette autre phrase : « il n’est pas toujours mort ». La seule prédigestion de grandes quantités de données ne leur permet pas non plus de repérer les structures inédites si évidentes pour nous, comme les groupes de nombres identiques dans la suite 1223334444. Leur stratégie du presque-par-cœur est aussi aveugle aux anomalies inédites.
La détection des anomalies est un cas intéressant, car c’est souvent à travers elle que nous jaugeons l’intelligence d’autrui. Un réseau de neurones ne « verra » pas que le nez est absent d’un visage. Par continuité, il continuera à reconnaître la personne, ou peut-être la confondra-t-il avec une autre. Mais il n’a aucun moyen de réaliser que l’absence de nez au milieu du visage constitue une anomalie.
Il existe bien d’autres mécanismes cognitifs qui sont inaccessibles aux réseaux de neurones. Leur automatisation fait l’objet de recherches. Elle met en œuvre des opérations effectuées au moment du traitement, là où les réseaux de neurones se contentent d’effectuer des associations apprises par avance.
Cybersecurity
Google’s unusual move to shut down an active counterterrorism operation being conducted by a Western democracy — www.technologyreview.com
Les équipes de sécurité de Google ont unilatéralement mis fin à une opération antiterroriste.
L’une des équipes de cybersécurité très respectées de Google a récemment attrapé un gros poisson inattendu : un groupe de pirates “experts” exploitant 11 puissantes vulnérabilités pour compromettre des appareils fonctionnant sous iOS, Android et Windows. Les exploits, qui faisaient appel à des techniques inédites, utilisaient des sites Web infectés pour diffuser des logiciels malveillants aux visiteurs. Ces piratages ont attiré l’attention des experts en cybersécurité en raison de leur ampleur, de leur sophistication et de leur rapidité.
MIT Technology Review a appris que les pirates en question étaient en fait des agents du gouvernement occidental menant une opération de contre-terrorisme. Lorsque Google a annoncé son intervention, il a omis des détails essentiels, notamment l’identité des responsables du piratage, les personnes visées et des informations techniques importantes. La décision de la société d’arrêter et de rendre publique l’attaque a provoqué des divisions internes chez Google et a soulevé des questions au sein des communautés du renseignement des États-Unis et de leurs alliés.
Hack & Data leak
SolarWinds hackers accessed emails from U.S. Department of Homeland Security — venturebeat.com
Des pirates informatiques soupçonnés de travailler pour la Russie ont eu accès à un compte de messagerie électronique appartenant à l’ancien chef du département américain de la sécurité intérieure, qui est responsable de la cybersécurité, dans le cadre du piratage de SolarWinds, a rapporté l’Associated Press lundi.
Le rapport de l’AP indique que la portée du piratage de Chad Wolf, l’ancien secrétaire par intérim du DHS, et des comptes de messagerie appartenant à des responsables de la cybersécurité du département, n’est pas connue du public.
Dans la brèche de sécurité de SolarWinds, révélée en décembre, des pirates ont infiltré le logiciel de gestion de réseau de l’entreprise technologique américaine et ajouté un code qui leur a permis d’espionner les utilisateurs finaux. Les pirates ont pénétré dans neuf agences fédérales et 100 entreprises.
Quantum Technologies
Des chercheurs messins font tomber un record du monde — www.centralesupelec.fr
Des chercheurs de la Chaire photonique de CentraleSupélec ont participé à la création d’un laser générant plus de 250 trillions de nombres aléatoires par seconde, servant à sécuriser les informations numériques. Cette réalisation s’est effectuée au sein d’une collaboration internationale (laboratoire LMOPS de CentraleSupélec et de l’Université de Lorraine, Université de Yale, du Trinity College de Dublin, de l’Imperial College de Londres et de la Nanyang University of Technology de Singapour.
Chaque seconde, plusieurs dizaines de milliards de données numériques circulent dans chacune de nos liaisons de télécommunication. Pour sécuriser ces informations, un système de génération de données aléatoires est utilisé. Les techniques actuelles comportent notamment des algorithmes qui génèrent ces nombres, ainsi que des sources de bruits physiques, souvent d’origine électronique ou thermique. Ces deux techniques comportent cependant leurs limites : la première est vulnérable à des intrusions logicielles et la seconde a un débit limité.
Ce record est plus de 1 000 fois supérieur à celui de 2014, également établi par la Chaire photonique, puisqu’il permet la génération de 250 milliards de milliards de nombres.
Science
This new image shows off magnetic fields swirling around a black hole — www.technologyreview.com
Les astronomes ont publié une toute nouvelle image du trou noir supermassif au centre de la galaxie M87. Il s’agit d’un complément plus net à une image historique de 2019, montrant la lumière polarisée qui trace les lignes de champ magnétique du monstre.
Le télescope Event Horizon est entré dans l’histoire le 10 avril 2019, en publiant la toute première image d’un trou noir. Le cercle orange vif, situé à 53 millions d’années-lumière, a été imagé par huit observatoires radio répartis sur quatre continents distincts. Leur résolution combinée a permis de scruter le centre de M87 et d’apercevoir la lumière rougeoyante des gaz et des poussières ultra chauds tourbillonnant autour de l’horizon des événements du trou noir supermassif (le point de non-retour, où la gravité du trou noir est si puissante qu’aucune lumière ou matière ne peut s’échapper de ses griffes).
Dans une série de nouvelles études publiées dans l’Astrophysical Journal, des astronomes ont parcouru les archives de données qui ont conduit à la première image et ont analysé le mouvement de la lumière polarisée autour de l’objet. Les ondes lumineuses oscillent normalement d’avant en arrière, dans de nombreuses directions différentes. Mais ces ondes peuvent être polarisées par des champs magnétiques, et cette oscillation devient confinée à un seul plan linéaire. Cette lumière trace effectivement les lignes de champ magnétique du trou noir, créant un visuel plus net que le beignet flou montré en 2019.
Les champs magnétiques façonnent la façon dont la matière autour du trou noir se déplace et tourbillonne, ce qui peut modifier la quantité de matière moyenne absorbée et l’évolution d’un trou noir. En étudiant le fonctionnement et l’évolution de ces champs magnétiques au fil du temps, les scientifiques peuvent mieux comprendre comment la matière en accrétion autour du trou noir se comporte et comment elle est influencée, ce qui peut inévitablement aider à nous en dire plus sur la formation des trous noirs supermassifs et leur croissance.